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16.12.2022
A PROPOS DE L’APPEL CIVIL

1. Déféré :

Périmètre d’intervention

Civ. 2ème, 9 juin 2022, n°21-10724

La Cour d’appel, saisie sur déféré, ne peut statuer que dans le champ de compétence d’attribution du conseiller de la mise en état et ne peut connaitre de prétentions ou d’incidents qui n’ont pas été soumis à ce dernier.

2. Déclaration d’appel :

A/ Indivisibilité de l’objet du litige

Civ. 2ème, 9 juin 2022, n°20-20936 ou 21-11401

Si l’appelant n’est pas tenu de mentionner dans la déclaration d’appel un ou plusieurs des chefs de dispositif du jugement qu’il critique lorsqu’il entend se prévaloir de l’indivisibilité de l’objet du litige, il n’en doit pas moins se référer, dans la déclaration, à cette indivisibilité.

B/ Dépendance entre chefs de jugement

Civ. 2ème, 9 juin 2022, n°20-16239

L’appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent, lesquels s’entendent de tous ceux qui sont la conséquence des chefs de jugement expressément critiqués. Il appartient à la cour d’appel de rechercher le lien de dépendance entre les chefs de jugement dont l’appelant invoque l’existence.

C/ Identification de l’indivisibilité

Civ. 2ème, 9 juin 2022, n°20-15827 Civ. 2ème, 17 nov. 2022, n°20-19782

L’indivisibilité du litige, au sens des articles 529 et 905-2, alinéas 2 et 3 du CPC, nécessite l’impossibilité d’exécuter simultanément plusieurs chefs de dispositifs de jugement dans un même litige.

3. Radiation pour inexécution

Civ. 2ème, 9 juin 2022, n°19-11671

La radiation de l’instance d’appel, fût-ce pour inexécution du jugement frappé d’appel, n’entraine pas la suspension du délai imparti à l’appelant pour conclure.

4. Appel incident entre co-intimés

A/ Co-intimé défaillant

Civ. 2ème, 9 juin 2022, n°21-12974

L’appel incident formé par un intimé contre un co-intimé défaillant est valablement formé par la signification de conclusions et n’a pas à revêtir la forme d’une assignation.

B/ Intimé dont les conclusions sont irrecevables

Civ. 2ème, 9 juin 2022, n°20-15827

Lorsque l’intimé ne conclut pas dans le délai requis à compter de la notification des conclusions d’appel principal, il ne peut valablement conclure, à l’occasion d’un appel incident ultérieurement formé par une autre partie, qu’à l’égard de cette dernière et non à l’égard de l’auteur de l’appel principal.

5. Concentration temporelle des prétentions

Civ. 1ère, 9 juin 2022, n°20-20688

En application de l’article 910-4, alinéa 2 du Code de procédure civile, l’irrecevabilité prévue par son alinéa 1er ne s’applique pas aux prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses. Tel est le cas en matière de partage où, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse.

Civ. 2ème, 20 oct. 2022, n°21-16907

Est irrecevable une demande de fixation de la créance dès lors que la procédure collective était connue avant l’expiration des délais légaux pour conclure.

6. Indivisibilité et condamnation in solidum

Civ. 3ème, 11 mai 2022, n°21-15217

Une décision qui rejette une demande en paiement in solidum contre plusieurs défendeurs ne crée entre eux aucune indivisibilité. Une cour d’appel ne peut dès lors déclarer irrecevable la demande en réparation faute d’avoir intimé toutes les parties contre lesquelles la demande avait été formée.

7. Appel régularisation et message électronique

Civ. 2ème, 30 juin 2022, n°21-12720

La déclaration d’appel qui ne mentionne pas expressément les chefs de jugement critiqués ne peut être régularisée que par une nouvelle déclaration d’appel dans le délai imparti à l’appelant pour conclure au fond, conformément à l’article 910-4 alinéa 1 du CPC. Un message électronique de l’avocat de l’appelant ne peut, quel que soit son libellé et même adressé au greffe dans le délai requis, valoir régularisation de la déclaration d’appel.

8. Annexe à la déclaration d’appel

Avis, Cour de cassation, 8 juin 2022 n°22-70005

A la déclaration d’appel peut être jointe une annexe même en l’absence d’empêchement technique (suite et fin d’une saga qui a mobilisé le monde judiciaire…). Par prudence faire référence dans la déclaration d’appel à l’existence de ladite annexe.

9. Formalisme des conclusions

Civ. 2ème, 8 sept. 2022, n°21-12736

L’article 954 alinéas 2 et 3 du CPC n’exige pas que « les prétentions et les moyens contenus dans les conclusions d’appel figurent formellement sous un paragraphe intitulé discussion. Il importe que ces éléments apparaissent de manière claire et lisible dans le corps des conclusions ».

10. Note en délibéré

Civ. 2ème, 6 oct. 2022, n°21-14996

Le juge qui invite les parties à produire une note en délibéré n’est pas libre de choisir les éléments qu’il retient : dès lors que les éléments adressés au juge sont en rapport avec la demande du juge, ils doivent faire l’objet d’un examen au fond.

11. Incompétence du Conseiller de la Mise en état pour prononcer l’irrecevabilité des prétentions nouvelles en appel

Cass. avis, 11 oct. 2022 n°15012

« L’examen des fins de non-recevoir édictées aux articles 564 et 910-4 du code de procédure civile, relatives pour la première à l’interdiction de soumettre des prétentions nouvelles en appel et pour la seconde à l’obligation de présenter dès les premières conclusions l’ensemble des prétentions sur le fond relatives aux conclusions, relève de l’appel et non de la procédure d’appel ». En conséquence les fins de non-recevoir fixées par les articles 564 et 910-4 du CPC relèvent de la compétence de la cour.

12. Procédure devant la Cour d’appel de renvoi

A/ Procédure à jour fixe antérieure

Civ. 2ème, 29 sept. 2022 n°20-22558

Lorsque l’arrêt d’appel cassé a été rendu selon la procédure à jour fixe, les formalités relatives à cette procédure n’ont pas à être réitérées, l’instruction étant reprise devant la cour d’appel de renvoi en l’état de la procédure non atteinte par la cassation.

B/ Effet dévolutif et libellé de l’acte de saisine

Civ. 2ème, 29 sept. 2022, n°20-19291

La portée de la cassation étant, selon les articles 624 et 625 du CPC, déterminée par le dispositif de l’arrêt qui la prononce, l’obligation prévue à article 1033 du CPC de faire figurer dans la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi après cassation qui n’est pas une déclaration d’appel, les chefs de dispositif critiqués de la décision entreprise tels que mentionnés dans l’acte d’appel, ne peut avoir pour effet de limiter l’étendue de la saisine de la cour d’appel de renvoi.

13. Tierce opposition : effet dévolutif

Civ. 2ème, 29 sept. 2022, n°21-13625

Il résulte de l’article 582 du CPC que l’effet dévolutif de la tierce opposition étant limité à la remise en question, relativement à son auteur, des points jugés qu’elle critique, le défendeur n’est pas recevable à présenter d’autres prétentions que celles tendant à faire écarter celles du tiers opposant.

14. L’entête des conclusions

Civ. 2ème 29 sept. 2022, n° 21-16220

Une erreur dans l’entête des conclusions concernant la désignation d’une partie intimée ne peut entrainer la caducité de l’appel alors même que la déclaration d’appel et les premières conclusions déposées sont sans ambiguïté.

15. Cassation juridiction de renvoi

Civ. 2ème, 8 sept. 2022, n°20-23622

La déclaration complémentaire de saisine de la cour d’appel de renvoi constituant une demande en intervention forcée non soumise au délai de deux mois prévu par l’article 1037-1 du CPC, encourt la cassation de l’arrêt qui la considère comme tardive.

16. Demande nouvelle en appel (CPC, art. 565)

Civ. 1ère, 7 sept. 2022, n°21-16646

N’est pas nouvelle en cause d’appel la demande en annulation d’une stipulation d’intérêts avec substitution au taux légal qui tend aux mêmes fins que celle en déchéance du droit aux intérêts, dès lors qu’elles visent l’une et l’autre à priver le prêteur de son droit à des intérêts.

17. Irrégularité de fond et simultanéité avec les autres actes de procédure

Civ, 2ème, 9 juin 2022, n°19-20592

Les irrégularités de fond peuvent être soulevées « en tout état de cause ». La Cour de cassation en déduit qu’elles n’ont pas à être soulevées simultanément avec les autres exceptions de procédure.

18. Forme des référés au lieu de PAF

Civ. 2ème, avis, 14 sept. 2020, n°22-70006

Si l’avocat emploie dans son texte l’ancienne formule « en la forme des référés » au lieu de « PAF », cette erreur ne crée pas une irrégularité mais doit donner lieu à correction automatique par transposition de régime.

19. Ordonnance de clôture prématurée

Civ. 2ème, 8 sept. 2022, n°20-23622

La déclaration complémentaire de saisine de la cour d’appel de renvoi constituant une demande en intervention forcée non soumise au délai de deux mois prévu par l’article 1037-1 du CPC, encourt la cassation de l’arrêt qui la considère comme tardive.

20. Procédure écrite devant la Cour d’appel

Civ. 2ème, 20 oct. 2022, n°21-17375

L’ordonnance de clôture ne doit pas être rendue prématurément par le conseiller de la mise en état. En l’espèce l’intimé à l’appel incident n’avait pas bénéficié du délai de 3 mois pour remettre ses écritures au greffe. La remise d’une note en délibéré ne pouvait assurer le respect du principe de la contradiction ; la cour d’appel ne pouvait rejeter la demande de nullité de l’ordonnance de clôture.

21. Vérification cour et signification 911

Civ. 2ème, 17 nov. 2022, n°20-20650

Dès lors que l’intimé a été cité par la signification de la déclaration d’appel, la cour d’appel n’est pas tenue de vérifier d’office si l’appelant a signifié ses conclusions à l’intimé dans le délai de l’article 911 du CPC.

12.12.2018
Avion foudroyé sur le tarmac : circonstance extraordinaire de nature à exonérer le transporteur aérien de son obligation d’indemnisation des voyageurs

Les jurisprudences française et communautaire ont une définition restrictive de la notion de circonstances extraordinaires permettant aux transporteurs aériens de s’exonérer de leur responsabilité en application de l’article 5 du Règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004.

 

Un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 12 septembre 2018 (n°17-11361) qualifie de circonstance extraordinaire la foudre affectant un avion stationné dans un aéroport, dans lequel devaient embarquer des voyageurs.

 

Ces voyageurs sont donc privés du paiement de l’indemnisation prévue à l’article 7 dudit Règlement en cas d’annulation ou de retard de vol de plus de trois heures.

 

La Haute Juridiction relève qu’un avion touché par la foudre ne remplit plus les conditions de sécurité optimales.

 

Elle reprend ainsi la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne, selon laquelle une circonstance extraordinaire ne peut pas être évitée même si toutes les mesures raisonnables ont été prises (CJCE, 19 novembre 2009, aff. C-402/07 et C-432/07 ; CJUE, 23 octobre 2012, aff. C-581/10 et C-629/10) et échappe à la maîtrise effective du transporteur aérien (CJCE, 22 décembre 2008, aff. C-549/07 ; CJUE, 17 avril 2018, aff. C-195/17).

La Cour de cassation rappelle les règles de preuve à la charge de l’employeur en matière de faute inexcusable commise à l’égard du salarié intérimaire

Par un arrêt en date du 11 octobre 2008, la Cour de cassation confirme que l’employeur d’un salarié intérimaire, affecté à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité, est présumé responsable d’une faute inexcusable ayant conduit à un accident du travail ou une maladie professionnelle et que cette présomption ne peut être renversée que par la preuve d’une formation renforcée à la sécurité prévue par l’article L.4154-2 du Code du travail.

 

Les seules mesures prises par l’employeur pour préserver le salarié des risques auxquels il est exposé sont insuffisantes.

 

Rappelons que la présomption de faute inexcusable est codifiée à l’article L.4154-3 du Code du travail.

 

En l’absence de formation, il appartient à l’employeur et à son assureur, qui seront seuls tenus d’indemniser le salarié et les organismes de Sécurité Sociale,  d’exercer un recours en garantie à l’encontre de l’entreprise utilisatrice auprès de laquelle le salarié intérimaire est mis à disposition.

 

Cass. 2ème civ., 11 octobre 2018, n° 17-23694

Responsabilité médicale : absence de méconnaissance de l’obligation d’information des risques en l’absence de réalisation de ces risques

Par arrêt en date du 14 novembre 2018, la Cour de Cassation précise que si les médecins sont débiteurs d’une obligation d’information des patients sur les risques de leurs actes de prévention, de diagnostic et de soins, une telle obligation n’est pas violée en l’absence de réalisation de ces risques.

 

En l’espèce, un enfant a été atteint de troubles graves dans les suites immédiates d’une vaccination contre l’hépatite B.

 

La Cour de cassation rappelle que les médecins sont tenus d’informer les patients sur les effets indésirables des vaccins, leurs contre-indications et leurs autres effets possiblement nocifs.

 

Elle ajoute que toutefois, en l’absence de preuve du lien de causalité entre les troubles et la vaccination, et partant de réalisation des risques de cette dernière, aucune méconnaissance de ladite obligation d’information ne peut être retenue.

 

Cass. 1ère civ., 22 novembre 2018, n° 17-27980 et 17-28529, FS-P+B

04.12.2018
Un mot sur la procédure participative

Créée par le décret n°2017-892 du 6 mai 2017 (articles 1543 et suivants du code de procédure civile), la procédure participative est rarement utilisée mais peut dans certaines circonstances présenter des avantages.

 

Elle consiste en la conclusion pour une durée déterminée, par les parties assistées par leurs conseils, d’un contrat  organisant les modalités d’une discussion amiable.

 

Tant que la convention est en cours, le juge ne peut pas être saisi, sauf inexécution d’une partie.

 

La prescription est également suspendue.

 

Surtout, les parties peuvent recourir à un tiers, notamment un technicien, dont le rapport pourra être produit en justice (article 1554 du code de procédure civile).

 

Elles peuvent ainsi organiser une expertise  judiciaire mais en choisissant l’expert (ce qui peut être utile lorsqu’on souhaite éviter une désignation malheureuse), maîtrisant sa rémunération, et contrôlant le rythme de l’expertise (ce qui permet de la suspendre pour des discussions, éviter un dépôt précipité du rapport, etc).

 

Cette procédure est à réserver à des dossiers à forts enjeux, dans lesquels il existe un très faible nombre de parties, aucun risque de nécessité d’appel à la cause postérieur de tierces parties, et une relative bonne foi de part et d’autre.

crédits et mentions légales